Effet de Serre

Solo show
Farah Khelil
Assisted by
Ons Karoui (site manager)
Samir Bahri (project manager)
Muriel Babandisha (edition manager)
Mediators
Ines Arif
Hossein Takriti

Effet de Serre

Solo show
Farah Khelil
Assisted by
Ons Karoui (site manager)
Samir Bahri (project manager)
Muriel Babandisha (edition manager)
Mediators
Ines Arif
Hossein Takriti

Effet de Serre is a conceptual, committed and critical gesture of renovation of Tunis’ municipal greenhouse at the Parc du Belvédère, which questions the very same definition of an artwork, the place of the artist and the role of cultural institutions. It points out the emancipation of an artistic gesture from the art market circuit by deviating a grant for artistic production towards an action of general interest. The greenhouse will become the site of an immersive installation made up of formal elements that draw on the botanical history of the Palmarium of Tunis. A publication in the form of an artist’s book will also be proposed in order to extend this project assembled from scratch by the artist.

Effet de Serre is a conceptual, committed and critical gesture of renovation of Tunis’ municipal greenhouse at the Parc du Belvédère, which questions the very same definition of an artwork, the place of the artist and the role of cultural institutions. It points out the emancipation of an artistic gesture from the art market circuit by deviating a grant for artistic production towards an action of general interest. The greenhouse will become the site of an immersive installation made up of formal elements that draw on the botanical history of the Palmarium of Tunis. A publication in the form of an artist’s book will also be proposed in order to extend this project assembled from scratch by the artist.

Endémiques d’Australie, les eucalyptus ont été importés aux quatre coins du globe. À l’époque impériale, puis coloniale, ils ont été commercialisés, disséminés à la faveur des échanges entre les empires occidentaux qui se sont mis à les transplanter et à les semer dans leurs colonies. La circulation de ces plantes a profondément bouleversé la physionomie de nombreux paysages en affectant les écosystèmes où ils étaient implantés. Ainsi, façonnant les panoramas, les eucalyptus sont arrivés sur les berges de la Méditerranée, d’abord en Algérie (entre 1854 et 1860), puis au Maroc, en Tunisie et en Libye. Aujourd’hui, ils habitent le paysage, fondus dans ces environnements étrangers, à tel point que l’histoire de leur circulation n’est pas toujours connue.

C’est en 2012 que cela saute aux yeux de Farah Khelil. Dans les mois qui suivent la Révolution tunisienne, elle lit notamment Orphelins de Bourguiba et héritiers du Prophète (2012) de Samy Ghorbal. Ce journaliste et écrivain revient sur l’histoire de la Tunisie et sur la dualité entre tradition et modernité, exprimant, dans sa conclusion, la tension entre ces deux notions à travers une analogie botanique originale. D’une part, il évoque le palmier (nakhl), arbre symbolique de la tradition coranique – cité 23 fois dans le livre sacré ; de l’autre, l’eucalyptus (kalatus), symbole de l’empreinte des colons. La plupart des milieux naturels apparaissent dessinés par l’action humaine. Combien de strates historiques l’étude de la flore peut-elle révéler ?

Endémiques d’Australie, les eucalyptus ont été importés aux quatre coins du globe. À l’époque impériale, puis coloniale, ils ont été commercialisés, disséminés à la faveur des échanges entre les empires occidentaux qui se sont mis à les transplanter et à les semer dans leurs colonies. La circulation de ces plantes a profondément bouleversé la physionomie de nombreux paysages en affectant les écosystèmes où ils étaient implantés. Ainsi, façonnant les panoramas, les eucalyptus sont arrivés sur les berges de la Méditerranée, d’abord en Algérie (entre 1854 et 1860), puis au Maroc, en Tunisie et en Libye. Aujourd’hui, ils habitent le paysage, fondus dans ces environnements étrangers, à tel point que l’histoire de leur circulation n’est pas toujours connue.

C’est en 2012 que cela saute aux yeux de Farah Khelil. Dans les mois qui suivent la Révolution tunisienne, elle lit notamment Orphelins de Bourguiba et héritiers du Prophète (2012) de Samy Ghorbal. Ce journaliste et écrivain revient sur l’histoire de la Tunisie et sur la dualité entre tradition et modernité, exprimant, dans sa conclusion, la tension entre ces deux notions à travers une analogie botanique originale. D’une part, il évoque le palmier (nakhl), arbre symbolique de la tradition coranique – cité 23 fois dans le livre sacré ; de l’autre, l’eucalyptus (kalatus), symbole de l’empreinte des colons. La plupart des milieux naturels apparaissent dessinés par l’action humaine. Combien de strates historiques l’étude de la flore peut-elle révéler ? 

C’est en partant de ce constat que Farah Khelil se penche sur la présence des eucalyptus en Tunisie, cherchant ce qu’ils dévoilent du pays, de son passé colonial et de son approche de la modernité après l’indépendance. Par le prisme botanique, puis le dépassant, elle interroge ce qui est pris pour acquis, fouille des archives convoquant le patrimoine architectural de Tunis à travers l’étude du Palmarium sur lequel peu de recherches ont été effectuées. Détournant une serre horticole, elle propose d’examiner les mécanismes de monstration occidentaux. La superposition, l’oscillation entre visible et invisible deviennent des composantes clés du projet qui gagne en densité ontologique. Farah Khelil espère inciter des chercheurs⸱euses à étudier les changements d’architecture du Palmarium au siècle dernier, son destin reflétant l’évolution sociopolitique du pays. Sa quête vient flirter avec le spéculatif et la réinvention. Elle occupe le silence par touches minimes observant comment l’imaginaire et le regard s’emparent du réel, ou de l’historique, pour en faire autre chose. Sans porter de discours politique affiché, son projet explore la notion de possible.

C’est en partant de ce constat que Farah Khelil se penche sur la présence des eucalyptus en Tunisie, cherchant ce qu’ils dévoilent du pays, de son passé colonial et de son approche de la modernité après l’indépendance. Par le prisme botanique, puis le dépassant, elle interroge ce qui est pris pour acquis, fouille des archives convoquant le patrimoine architectural de Tunis à travers l’étude du Palmarium sur lequel peu de recherches ont été effectuées. Détournant une serre horticole, elle propose d’examiner les mécanismes de monstration occidentaux. La superposition, l’oscillation entre visible et invisible deviennent des composantes clés du projet qui gagne en densité ontologique. Farah Khelil espère inciter des chercheurs⸱euses à étudier les changements d’architecture du Palmarium au siècle dernier, son destin reflétant l’évolution sociopolitique du pays. Sa quête vient flirter avec le spéculatif et la réinvention. Elle occupe le silence par touches minimes observant comment l’imaginaire et le regard s’emparent du réel, ou de l’historique, pour en faire autre chose. Sans porter de discours politique affiché, son projet explore la notion de possible.

Avec Effet de Serre, l’artiste sort des structures d’exposition et réinvente une autre expérience de rencontre avec ses œuvres, s’interrogeant sur le rôle de l’artiste et la place du public. Partant de la relation existante entre les palmiers et les serres botaniques, elle décide dans une esthétique du don de financer la restauration de la serre du Parc du Belvédère en espérant, qu’au-delà de la présentation de ses recherches et de sa publication, elle redynamise cette zone du parc. En effet, la serre devrait accueillir des ateliers pédagogiques pour les jeunes autour de l’écologie. Pas d’œuvre pérenne, ni de sculpture portant une plaque ou indiquant le passage de l’artiste dans l’espace public une fois que tout sera terminé. L’éphémère et le durable s’entrecroisent avec poésie et humilité.

Avec Effet de Serre, l’artiste sort des structures d’exposition et réinvente une autre expérience de rencontre avec ses œuvres, s’interrogeant sur le rôle de l’artiste et la place du public. Partant de la relation existante entre les palmiers et les serres botaniques, elle décide dans une esthétique du don de financer la restauration de la serre du Parc du Belvédère en espérant, qu’au-delà de la présentation de ses recherches et de sa publication, elle redynamise cette zone du parc. En effet, la serre devrait accueillir des ateliers pédagogiques pour les jeunes autour de l’écologie. Pas d’œuvre pérenne, ni de sculpture portant une plaque ou indiquant le passage de l’artiste dans l’espace public une fois que tout sera terminé. L’éphémère et le durable s’entrecroisent avec poésie et humilité.

Effet de Serre n’est pas une exposition au sens classique où on l’entend, il s’agit davantage d’un processus dynamique, d’une expérimentation en espace public complétée par une publication, plus proche de l’agencement de formes et de points de vue.  C’est un dispositif avec une continuité entre les diverses phases du projet dont les visiteurs⸱euses ne peuvent percevoir l’entièreté.

La déambulation dans la serre convoque les sens et les perceptions. En son sein, aucune œuvre sur les parois, mais plusieurs points d’étape – au sol, sur une structure centrale en bois et sur une ossature métallique ; suspendus et projetés – entre lesquels circuler jusqu’au fond de la serre. L’odorat est stimulé par une diffusion atmosphérique d’eucalyptus ; l’ouïe répercute les stridulations de la vidéo Les siffleurs et le brouhaha enregistré dans le centre commercial du Palmarium ; l’œil du sol aux arceaux se fraie un passage ; le corps évolue dans l’espace, tout comme l’air et la lumière circulent, ajoutant du mouvement et des jeux d’ombres à l’expérience. Les œuvres de Farah Khelil se superposent dans des effets de plans et d’échelle. Dès l’entrée, un tissu suspendu reprend les lignes d’un article d’époque narrant l’ouverture du Palmarium. Au sol et sur la structure centrale, on trouve deux compositions multiples avec photographies, archives, aquarelles, éléments naturels, néons, plaques de verre, rétroprojecteurs et compositions en résine. Plus avant dans l’espace, une photographie, mêlant les plans originaux du Palmarium avec du vivant, se déploie en quatre panneaux suspendus. Enfin, dans la partie arrière, deux structures en métal et bois découpé reprenant les motifs ornementaux des portes du Théâtre Municipal de Tunis entravent une partie de l’espace où se trouve la vidéo Les siffleurs et une tringle en métal recueille des sérigraphies et cyanotypes sur draps anciens. Le fait d’exposer les pièces dans une serre soumise au vent, à la pluie, à la poussière et à la terre qui se soulèvent et à l’humidité a un impact très fort ; c’est délibérément accepter l’altération des éléments composant les Points d’étape, leur modification sous les effets conjugués de plusieurs facteurs.

Effet de Serre n’est pas une exposition au sens classique où on l’entend, il s’agit davantage d’un processus dynamique, d’une expérimentation en espace public complétée par une publication, plus proche de l’agencement de formes et de points de vue.  C’est un dispositif avec une continuité entre les diverses phases du projet dont les visiteurs⸱euses ne peuvent percevoir l’entièreté.

La déambulation dans la serre convoque les sens et les perceptions. En son sein, aucune œuvre sur les parois, mais plusieurs points d’étape – au sol, sur une structure centrale en bois et sur une ossature métallique ; suspendus et projetés – entre lesquels circuler jusqu’au fond de la serre. L’odorat est stimulé par une diffusion atmosphérique d’eucalyptus ; l’ouïe répercute les stridulations de la vidéo Les siffleurs et le brouhaha enregistré dans le centre commercial du Palmarium ; l’œil du sol aux arceaux se fraie un passage ; le corps évolue dans l’espace, tout comme l’air et la lumière circulent, ajoutant du mouvement et des jeux d’ombres à l’expérience. Les œuvres de Farah Khelil se superposent dans des effets de plans et d’échelle. Dès l’entrée, un tissu suspendu reprend les lignes d’un article d’époque narrant l’ouverture du Palmarium. Au sol et sur la structure centrale, on trouve deux compositions multiples avec photographies, archives, aquarelles, éléments naturels, néons, plaques de verre, rétroprojecteurs et compositions en résine. Plus avant dans l’espace, une photographie, mêlant les plans originaux du Palmarium avec du vivant, se déploie en quatre panneaux suspendus. Enfin, dans la partie arrière, deux structures en métal et bois découpé reprenant les motifs ornementaux des portes du Théâtre Municipal de Tunis entravent une partie de l’espace où se trouve la vidéo Les siffleurs et une tringle en métal recueille des sérigraphies et cyanotypes sur draps anciens. Le fait d’exposer les pièces dans une serre soumise au vent, à la pluie, à la poussière et à la terre qui se soulèvent et à l’humidité a un impact très fort ; c’est délibérément accepter l’altération des éléments composant les Points d’étape, leur modification sous les effets conjugués de plusieurs facteurs.

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Pour l’artiste, Effet de Serre est une chance : celle d’un champ libre et inspiré qui questionne comment le musée et la serre peuvent devenir des lieux vivants, reliés, et non pas des lieux statiques. Ainsi, Effet de Serre s’apprécie en prenant le temps de vivre la recherche d’archives, la serre et les œuvres, et, enfin, la publication, en se laissant imprégner par les récits en suspens qui s’y croisent, et, surtout, en se questionnant sur les paysages familiers, les architectures oubliées, les symboliques des plantes, et la façon dont les méthodes d’exposition conditionnent le regard. Ici, la transmission est clé.

Pour l’artiste, Effet de Serre est une chance : celle d’un champ libre et inspiré qui questionne comment le musée et la serre peuvent devenir des lieux vivants, reliés, et non pas des lieux statiques. Ainsi, Effet de Serre s’apprécie en prenant le temps de vivre la recherche d’archives, la serre et les œuvres, et, enfin, la publication, en se laissant imprégner par les récits en suspens qui s’y croisent, et, surtout, en se questionnant sur les paysages familiers, les architectures oubliées, les symboliques des plantes, et la façon dont les méthodes d’exposition conditionnent le regard. Ici, la transmission est clé.

Greenhouse of the Parc du Belvédère, Tunis, Tunisia
October 30 – December 30, 2021

The exhibition received support from the Arab Fund for Arts and Culture (AFAC), Association des Amis du Belvédère,  Centre d’Études Maghrébines à Tunis (CEMAT), Council of American Overseas Research Centers, Goethe-Institut Tunis, Municipalité de Tunis and 32Bis Centre d’art contemporain in Tunis.

TO THE ARTIST'S WEBSITE

Greenhouse of the Parc du Belvédère, Tunis, Tunisia
October 30 – December 30, 2021

TO THE ARTIST'S WEBSITE

The exhibition received support from the Arab Fund for Arts and Culture (AFAC), Association des Amis du Belvédère,  Centre d’Études Maghrébines à Tunis (CEMAT), Council of American Overseas Research Centers, Goethe-Institut Tunis, Municipalité de Tunis and 32Bis Centre d’art contemporain in Tunis.

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